ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
VILLENEUVE-D'ASCQ,
le 10 juin 2011.

2) - Compte rendu du séjour du 10 au 12 juin 2011
par Dominique Samson.

*

CETTE ANNÉE, LES ENFANTS NÉS DE LA GUERRE
N'ONT PAS ENCORE PERDU LE NORD !


Pour tous ceux qui sont venus à notre rencontre nationale à Villeneuve-d'Ascq, arrivés dans la cité scientifique de l'Université de Lille 1 pour trouver ASCOTEL, notre lieu de retrouvailles, d'assemblée générale et d'hébergement pendant plusieurs jours, ne pas perdre le nord a parfois été un défi difficile à relever.

Imaginez la perplexité de certains conducteurs, démunis du précieux GPS, devant les panneaux indicateurs : CERLA (non, ce n'est pas par là !), COSEC (cause pas et regarde le plan !), CUEEP, IEMN, MASS, PCET, POLYTECH (ne nous énervons pas et restons polis !), SUAIO (c'est le chauffeur qui a des sueurs !), SUDES (déjà qu'on trouve pas le nord !), etc...
En fait, ce sont les noms des différentes écoles d'ingénieurs et des bâtiments administratifs et logistiques (et je n'ai pas tout cité !) qui composent ce vaste plateau où la science est reine et où le futur est en gestation dans les jeunes têtes studieuses venues du monde entier.

Enfin, voyant la façade rosée de l'hôtel ASCOTEL, les naufragés des périphériques lillois, après souvent de longs kilomètres à travers la France, s'imaginent dans la peau de Livingstone arrivant enfin au bout du voyage après avoir traversé l'Afrique Centrale inconnue et redoutable. Et quel chaleureux oasis trouvent-ils ! Vite, posons les bagages pour que l'on puisse s'embrasser, échanger les nouvelles, faire connaissance avec les nouvelles têtes, prendre la clef du nid douillet. Par contre, il va falloir, ce jeudi soir, organiser une autre expédition pédestre pour trouver de quoi se restaurer, car dans le secteur, il n'y a rien. Pourtant, un étudiant, cela doit bien manger aussi ?

© Photos (1) : J. Sauval-Schmutzler - 10/06/2011

Avant de partager avec vous quelques souvenirs des superbes promenades dans ce coin de France que je connaissais peu, à part Boulogne-sur-Mer, je voudrais faire une digression sur... les lapins. Vous êtes-vous promené seul le matin de très bonne heure ou à la tombée de la nuit sur le campus universitaire ? De nombreuses pelouses, et même plusieurs prairies, entourent les bâtiments. Et là, batifolaient des dizaines de lapins, peu sauvages et intrigués de ma présence. Pourtant, aucun ne m'a offert une carotte de bienvenue !

La carotte était en fait, parmi vous tous, représentée par vos sourires, vos attentions communes, le plaisir d'être ensemble. Et s'il y a un lapin qui n'a pas été posé, c'est celui de la vraie amitié. Cela fait du bien et m'encourage à poursuivre mon récit. Je ne reviendrais pas sur l'Assemblée Générale, ni sur les moments festifs passés ensemble. Josiane van Mierlo-Mauchauffée l'a fait excellemment, avec chaleur et avec une plume trempée dans l'encre de la sensibilité.

LILLE ET CASSEL

Samedi matin, le temps est gris et les cœurs ensoleillés. Partagés dans trois cars, direction la capitale du Nord, LILLE, à l'histoire mouvementée par douze sièges. D'abord flamande (avec la fameuse Jeanne de Flandre, dite de Constantinople), puis bourguignonne (avec Philippe II de Bourgogne, dit le Hardi), elle passe dans le Saint-Empire germanique (branche des Habsbourg). Combien y a-t-il eu d'enfants, à ce moment, nés de pères ou de mères ayant la double appartenance territoriale ? Puis, la Flandre est transmise à la couronne espagnole.

C'est alors que le roi Louis XIV, grand surtout par sa convoitise et ses ambitions, réclame le pays du nord pour son épouse Marie-Thérèse d'Autriche. Après bien des batailles, le territoire est rattaché définitivement à la France par le traité d'Utrech, en 1713. On reverra les allemands à Lille un peu plus tard, mais c'est une autre histoire. Ne perdons pas le nord, ni le fil du récit. Je ne vais pas non plus vous refaire la visite de Lille, car il faudrait que je vous communique les dix pages de notes que j'ai écrites à la suite de cette passionnante ballade. Notre érudite guide nous a ouvert des pans entiers de l'histoire de la ville, satisfaisant notre curiosité et nous donnant l'envie de revenir en ces lieux.

Je rappellerais seulement quelques moments forts :
La statue d'Alexandre Desrousseaux, dans le square Foch, cela vous rappelle quelque chose ? C'est l'auteur de la fameuse chanson " L'Canchon Dormoire " ou " Le P'tit Quinquin ". C'était une berceuse composée en 1853 pour une dentellière du quartier Saint-Sauveur qui essayait d'endormir son bébé Narcisse. Toujours dans le même quartier, c'est dans l'estaminet " À la Vignette " que fut interprétée pour la première fois, le 23 juillet 1888, la célèbre chanson " L'internationale ", par la chorale de " La lyre des travailleurs ". La chanson avait été écrite en pleine répression de la Commune de Paris, en 1871. Quand est-ce que l'ANEG crée une chorale ? Il y en a parmi nous qui ont de belles voix.

L'ERMITAGE GANTOIS, fondé en 1462 par Jean de la Cambe, riche bourgeois de la ville, a été en activité pendant plus de cinq cent ans. C'est maintenant un hôtel de luxe depuis 2003. L'immense HÔTEL-DE-VILLE, de style néo-flamand, a été construit de 1924 à 1932. Son beffroi (inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco) était le plus haut de France à l'époque, avec 104 mètres. C'est pas Jeanine qui voulait grimper tout en haut ? LA PORTE DE PARIS est un beau reste des fortifications protégeant Lille. Élevé en l'honneur du modeste roi Louis XIV, les ouvriers du quartier voulaient raser ce symbole monarchique. Viollet-le-Duc et Mérimée sauvèrent le monument.
Nous serons aussi étonnés par l'audace des nouvelles constructions d'EURA LILLE, inaugurée en 1994, par de grands architectes (Guy de Portanzac, Jean Nouvel, Claude Vasconi, Rem Koolhaas, etc...). Et pour les amis parisiens, je rappelle que la gare de Lille-Flandre est en fait l'ancienne gare du Nord parisienne, remontée ici en 1867, pour des trains allant toujours plus loin vers le nord.

Longeant la haute et la moyenne Deule, passant non loin de la CITADELLE (1668), première œuvre de Vauban, réalisée seulement en trois ans, actuel Quartier Général du Corps de Réaction rapide, oeuvrant sous la conduite de l'OTAN, nous passons devant l'hôtel de Wambrechies (1703), aux 360 fenêtres, puis la maison où est né le général De Gaulle, le 22 novembre 1890, rue Princesse. À ce sujet, nous passerons plus tard non loin de la célèbre PATISSERIE MEERT, existant depuis 1761. C'est là qu'enfant, le futur général venait s'offrir deux sous de gâteaux. Puis, avec les trois sous restant, donnés par sa grand-mère, il en dépensait deux pour les manèges et un pour acheter un soldat de plomb (déjà la vocation !). Salivons en voyant ce qu'il y a dans les vitrines : gaufres fourrées à la vanille, charlottes aux framboises, pralines feuilletines, caramels, macarons, guimauves et chocolats. Arrêtez le supplice ! Nous n'en pouvons plus et nous allons salir la vitrine avec nos langues collées sur le verre. C'est devant ce magasin aussi que Pierre Ménard, en 1942, fut remis à ses parents adoptifs. Intense moment d'émotion pour lui, à cet instant.

Nous voyons ensuite l'HÔTEL CREPY-SAINT-LEGER (1899) et l'HÔTEL D'HESPEL (1896), le plus beau de Lille. Le comte d'Hespel s'est suicidé avant d'habiter les lieux, ruinés par son projet architectural démesuré. Les deux immeubles sont maintenant le siège de la Banque de France. Nous arrivons enfin devant l'HOSPICE COMTESSE, fondé en 1236 par Jeanne de Constantinople, dont j'ai évoqué le nom au début de ce récit, reconstruit au XVème siècle et en 1724. C'est maintenant un beau musée. À l'extérieur, sur le mur de la chapelle au remarquable plafond, une inscription déclare : " Si tu as dans ton cœur mon amour bien gravé, garde toi de passer sans me dire un Avè ". Alors des Avè, j'en ai plein à dire pour vous tous, mes sœurs et frères de l'ANEG.

Lille : la Grand Place.

Lille : Cathédrale Notre-Dame-de-la-Treille :
Piéta du portail.

Nos amis les "Toutous", toujours les bienvenus,
et leurs maîtres aussi... devant la Cathédrale : interdiction d'entrer.
© Photo (3) : Daniel Mauchauffée - 11/06/2011

Nos pas nous mènent vers la CATHÉDRALE " NOTRE-DAME-DE-LA-TREILLE ". Construite dans un quartier ouvrier, elle se fera par tranches successives, selon les moyens financiers disponibles. Cela durera de 1856 à 1999. Remarquable est la façade faite de cent dix plaques de marbre de 28 mm d'épaisseur. De l'intérieur, lorsque le soleil (car il y en a aussi dans le nord !) inonde la façade, on a l'impression de la présence d'un voile et non d'un mur. La crypte de 2.500 m2 est la plus vaste d'Europe. On y fera un jour notre assemblée, lorsque notre association dépassera le millier d'adhérents...
Nous terminerons par la très belle PLACE DU THÉATRE. Sur les façades, quand deux anges se regardent, il s'agit de la même maison. Quand ils se tournent le dos, ils indiquent la séparation entre deux maisons. Et quand c'est dans une maison d'un membre de l'ANEG, c'est que ses habitants boudent de ne pouvoir être avec nous... Nous traversons ensuite la VIEILLE BOURSE (1652-1653), une pure merveille datant de l'occupation espagnole. Composée de vingt-quatre maisons identiques autour d'une cour ressemblant à un cloître, c'était le centre commercial de l'époque. De l'autre côté, nous débouchons sur la GRANDE PLACE. Au centre, la colonne commémore la résistance de la ville au siège autrichien de 1792. Selon la légende, la déesse surmontant la colonne serait inspirée de l'épouse du maire de l'époque, en 1842. Et sur un des côtés de la place, se trouve le siège du journal " La Voix du nord ", construit en 1934. Les vingt-huit fenêtres représentent les vingt-huit éditions du journal à son origine.

Mais les visiteurs anégiens ne perdent pas le nord. Surtout leurs estomacs, car il est midi. L'heure de reprendre les cars pour traverser le plat pays, si bien chanté par Jacques Brel, pour gagner une autre curiosité, le village de CASSEL et son restaurant " Le sauvage ". Mais rassurez-vous, on' y fait pas bouillir de quelconque prisonnier dans une grosse marmite pour les manger après. Cassel est une exception géographique, car c'est en fait une butte de 176 m d'altitude, d'où l'on jouit d'une vue à des dizaines de kms à la ronde. Les militaires ne s'y sont pas trompés, car ce bourg élevé a été assiégé, pris ou repris douze fois, dévasté ou incendié neuf fois, démoli quatre fois, restauré cinq fois et bombardé deux fois (sauf pendant la guerre 1914/1918, grâce à la présence de la statue de Notre-Dame de la Crypte).

Repas du midi pris au restaurant "Le Sauvage" à Cassel.
© Photos (6) : J. Sauval-Schmutzler - 11/06/2011

Le maréchal Foch (dont la statue équestre veille sur la butte, près du moulin du XVIIIème siècle déménagé d'Arnèke en 1947, le précédent moulin ayant brûlé le 30 octobre 1911) a résidé dans une maison de Cassel du 24 octobre 1914 au 9 mai 1915, puis pendant la bataille du mont Kemmel. Dans ses souvenirs, le maréchal Foch écrira en 1926 : " Mon inquiétude en 1914 et mon regard s'étendaient surtout d'Ypres à Nieuport. Ce sont les feux de cette ligne que je considérais la nuit de la hauteur de Cassel... ". Le samedi 11 juin 2011, les seuls tapages de bataille que l'on entendit à Cassel furent les bruits de fourchettes à la place des cliquetis des fusils se réarmant et les rires joyeux à la place des ordres aboyés. Et pour ceux qui musardèrent dans le village, la promenade digestive sur le circuit des anciens remparts fut fort bucolique. Pour les amoureux de l'art, la visite du musée des Flandres a été un ravissement. Pour les fureteurs comme moi, la visite du cimetière me fera découvrir la tombe de Dominique-Joseph René Vandamme (pas le réalisateur belge, spécialiste des arts martiaux !), mais le général d'Empire, comte d'Unsebourg, né à Cassel en 1770. Ayant pas mal guerroyé pour Napoléon 1er, la chute de l'empereur lui causa pas mal d'ennuis. Mais finalement, il put revenir goûter une retraite méritée à Cassel, où il est mort dans son lit en 1830. Son nom est gravé sur le côté nord (est-ce un hasard ?) de l'arc de triomphe de l'Étoile, à Paris.

Mais par cette belle après-midi ensoleillée, comment, à la terrasse d'un café, ne pas goûter à de vraies frites (la Belgique n'est pas loin !) et à une bonne bière. C'est l'exercice obligatoire auquel se sont livrés certains d'entre nous avec pertinence. La fatigue bien connue des touristes experts ne nous empêchera pas d'apprécier, le soir même, le diner festif, ni de continuer à nous mettre en jambes par quelques danses endiablées.

BOULOGNE-SUR-MER ET LES DEUX NEZ

Malgré l'envie de rester au lit et une docte et nerveuse discussion sur la qualité du couscous, dit " Royal ", dans les bus, Francis, notre remarquable organisateur, donnera une note philosophique plus sereine en concluant : " La vie n'est pas une mer tranquille ". C'est que nous n'allons pas faire un fleuve de cette contestation, mais nous diriger vers la mer, la seule à être autorisée à être agitée aujourd'hui dimanche.

Boulogne-sur-Mer, cette ville va me rappeler quelques souvenirs de journées de commémoration, auxquelles j'ai assisté en 1981, pour le centenaire du décès de l'égyptologue Auguste Mariette en 1881, né en cette ville en 1821. Cela fera donc trente ans que je n'étais pas revenu ici. Comme le temps passe ! Je fais faux bond à l'assistance, car j'ai bien l'intention de me faire une sorte de petit pèlerinage à l'égyptienne. Il n'y aura pas les chameaux, seulement les mouettes au-dessus de moi. Un petit tour autour de l'obélisque, venant de Louxor, entre les boulevards Sainte-Beuve et Gambetta, érigée en présence de Louis-Philippe en 1836, et je monte vers la vieille-ville. C'est dimanche, il y a peu de magasins ouverts, à part les restaurants, et ce qui est pire, peu de touristes. Arrivé au square Mariette, devant la pyramide érigée en la mémoire de MARIETTE en 1882, je revois un jeune homme de trente-trois ans, prenant des notes et photographiant : moi-même. Seul face à mes souvenirs, l'émotion est palpable. À côté, a été installée la reconstitution d'une barque solaire de Khéops, de 43,50 mètres de long, trouvée au pied de la pyramide du même nom, à Gizeh. Mon temps de liberté étant compté, je vais néanmoins faire un saut dans la cour du vieux-château et dans la basilique Notre-Dame, où un reliquaire dit du " Saint-Sang " contiendrait une portion du sang du Christ, ramené par Godefroy de Bouillon en 1100. Le papa du croisé était Eustache II " aux belles moustaches ", qui envahit l'Angleterre avec Guillaume le Conquérant (c'est Napoléon 1er qui a été jaloux !). Quand au frère de Godefroy de Bouillon, Beaudoin, comte de Boulogne, il fut le premier roi chrétien de Jérusalem.

Marie-Cécile, notre Présidente d'honneur.
Toujours fidèle, notre ami "Diabolo",
le féroce toutou monte la garde.
Repas du midi pris au restaurant "Les gens de la mer" à Boulogne-sur-Mer.
© Photos (8) : J. Sauval-Schmutzler - 12/06/2011

Vers 633 ou 636, une vierge apparaît dans une chapelle de la ville. Elle indique aux fidèles présents l'arrivée dans le port d'une embarcation portant une vierge à son image. Dans le bateau nimbé de lumière, il n'y avait aucune rame, aucun matelot. Sans doute un drone céleste ! Les révolutionnaires qui aiment se chauffer, mais avaient quelques griefs contre l'église, brûleront la statue. Les grands pèlerinages avaient déjà cessé au XIVème.

En début d'après-midi, accompagnés de guides charmantes, nous faisons en bus un tour de la ville, notamment des murs de fortifications autour du château. Nous passerons devant la statue (1865) du docteur anglais Edward Jenner, qui fit son premier essai de vaccin contre la variole, à Boulogne, en 1800, sur trois petites filles de la rue des Pipots. Suivra la statue du docteur Duchenne, né à Boulogne en 1806. Travaillant sur les maladies du système nerveux, il décrivit, en 1868, la dystrophie musculaire ou myopathie de Duchenne.
Rappelons aussi que l'écrivain Sainte-Beuve est né à Boulogne-su-Mer en 1804. Ayant quitté la ville en 1823, il n'y est jamais revenu, mais ne l'oublia jamais non plus. À ce stade de lecture, vous ne trouvez pas que tous ceux qui assistent à nos rencontres nationales en reviennent plus savants ?

Nous passons ensuite devant la Chambre de Commerce. En face, un énorme médaillon de sept mètres de hauteur, en tôle découpée, représente les silhouettes de la France et de l'Angleterre. Le tout forme un visage, avec deux mains qui se rejoignent. Cette œuvre a été inaugurée en 2004 pour les " Cent ans de l'entente cordiale ". Elle a été réalisée par Bruno Maillard " découpeur de tranches de vie " comme il aime se définir. C'est aussi lui qui a créé les sculptures de quatre mètres de haut et pouvant résister à des vents de 130 kilomètres heure, installées sur les ponts de l'A16, entre Boulogne et Calais, en 1990, que l'on verra au retour. On y verra le pêcheur, le tireur à l'arc, le joueur de tennis, le cavalier, le joueur de golf, le saute-mouton, la famille en promenade, le véliplanchiste et le tireur au fusil.

L'inventeur de l'hélice à spirale, Fréderic Sauvage, sera une des dernières sculptures vues avant de quitter Boulogne. Il inventa aussi le physionomètre, le réducteur de statue et le soufflet hydraulique. Né à Boulogne en 1786, il finit sa vie atteint par la folie, suite à des déboires d'invention. Il décéda à Paris en 1857.
Saluons au passage le général José San-Martin, libérateur du Pérou et du Chili et ayant eu un grand rôle politique en Argentine. Il décéda à Boulogne-sur-Mer, séjour d'été pour lui, le 17 août 1850.
Toujours pas de soleil, mais un fort vent violent et de la pluie froide, éléments dont nous allons bientôt ressentir les effets aux caps Blanc nez et Gris nez. Pourtant le " soleil " est réputé à Boulogne-sur-Mer. Il s'agit de cette coiffe traditionnelle en dentelle, rainurée comme une coquille Saint-Jacques.

Gagnant la côte, nous verrons la fameuse COLONNE NAPOLÉON, à WIMILLE. Élevé pour commémorer la remise de la Légion d'Honneur en 1804 par Napoléon, l'ouvrage fut financé par ses soldats médaillés. Terminée seulement en 1841, sous Louis-Philippe, c'est la colonne la plus haute de France, avec cinquante-quatre mètres et neuf cent soixante-neuf marches. Jeanine, toujours pas d'accord pour monter tout en haut ? Mais si Napoléon, le " petit caporal " était à Boulogne, c'est parce qu'il avait installé en ces lieux, de 1803 à 1805, un immense camp militaire et préparait l'invasion de l'Angleterre. Décidément, c'est une obsession chez les grands chefs d'aller envahir Albion. La première statue de Napoléon ler le représentait en habit de sacre. Abimée, elle fut remplacée par une autre, en 1962, mais en militaire. Pourquoi ce changement ? Sans doute parce que le président de la République était alors le général De Gaulle, lui qui avait eu affaire à la perfidie de certains anglais, pendant la guerre. Et Napoléon tourne le dos à l'Angleterre, regardant plutôt ses hommes. Cherchez l'ironie éventuelle...

WIMEREUX, c'est ici que PILASTRE DE ROZIER, accompagné du physicien Pierre-Ange Romain, se tuèrent en montgolfière, le 15 juin 1785, en tentant de traverser la Manche. Pilastre de Rozier est inhumé au village voisin de Wimille. AUDRESSELLES, village de pêcheurs voguant sur les caractéristiques flobarts, bateau d'échouage capable de flotter dans trente cm d'eau, est devenu l'été une station de vacances très prisée.
La côte est hérissée de fortifications du mur de l'Atlantique. Ainsi, l'impressionnante BATTERIE TODT, à AUDINGHEN. Composée de quatre blockhauss identiques, chacun est équipé de canons de 380 mm, tirant des obus fusants ou percutants à 42 kilomètres. Les murs ont 3,50 mètres d'épaisseur. Les fondations plongent à 20 mètres de profondeur. Les murs apparents font 10 mètres de haut. Le bâtiment restant a un diamètre de 40 mètres Si je vous donne ces chiffres, c'est que je vais vous donner un devoir d'été : calculez le nombre de m3 de béton nécessaires pour réaliser chaque fortification. Et interdit de prendre la calculette de poche.

À côté se trouve un dépôt de véhicules ou d'armements militaires. La pièce la plus étonnante est un canon K5, monté sur un wagon, fabriqué par Krupp à vingt-cinq exemplaires. Il en reste plus que deux maintenant, un ici et l'autre aux États-Unis. Ce canon de 280 mm ne pèse que 278 tonnes. Il a une portée de soixante kilomètres, quatre-vingt-six avec des munitions spéciales. Rappelons que le côte anglaise est à moins de 30 kilomètres.
Ce canon peut tirer huit à douze coups par heure. Il faut donc entre cinq et sept minutes pour introduire une lourde munition à l'intérieur du canon... et ne pas perdre le nord, car tout cela exige une équipe bien entrainée. Mais je ne suis pas sûr que c'est l'aspect armement auquel pense tout de suite l'assistance. Certains d'entre nous, comme un mirage dans le désert, s'imaginent peut-être voir leurs papas jugés sur le wagon ou regardant dans un coin la photo de la petite amie française. Maudite guerre où l'on est vu comme l'ennemi !

Nous arrivons enfin au CAP GRIS-NEZ. Malgré le brouillard, scrutant l'horizon, à cinquante mètres de haut, nous discernons les falaises anglaises à vingt-six kilomètres. Nous grelottons aussi en pensant aux nageurs téméraires qui traversent le channel, mais n'ont pas le droit de mettre le pied sur le sable anglais.
VICTOR HUGO, venant de Calais et se dirigeant vers Boulogne-sur-Mer, en 1837, a aimé cette région. Dans une lettre, il écrivit notamment : " La route court à travers les plus beaux paysages du monde " (et il n'était pas de Marseille !). Plus loin, il continue : " On remonte, et l'on retrouve le ciel, la terre, la mer, l'infini. Vraiment, je suis ébloui, chaque jour, de toutes les merveilles que Dieu fait avec du vert et du bleu... ". À ce moment-là, nous ne sommes pas loin de partager ses émotions.

Nous remontons dans les cars et direction WISSANT, où une surprise m'attend, pour mon plus grand bonheur. Nous passons devant le TYPHONIUM. Qu'est-ce que ce machin-là ? Un instrument de musique religieuse ? un médicament contre une surdose d'air iodé ? Rien de tout cela. Il s'agit d'une villa construite en style " temple égyptien " en 1891, pour Adrien Demont et Virginie Demont-Breton, tous deux artistes-peintres. À l'intérieur, des fresques représentent la famille habillée en égyptiens, accompagnée d'autres personnes en habits orientaux. Alors là, moi qui m'intéresse à l'égyptomanie, j'ai tous les sens en éveil. De retour à Rouen, j'aurais le grand plaisir d'être en relation avec une descendante des propriétaires.
Dans l'église de Wissant, il y a aussi une autre curiosité, la statue de Sainte Wilgeforte, sur la Croix, avec une belle barbe. La femme à barbe n'existe pas seulement dans les foires... Plus raisonnablement, il doit s'agir d'un Christ que l'on a revêtu pudiquement d'une robe, car en Orient, dès le VIème siècle, on ne voulait pas que le fils de Dieu soit représenté comme un vulgaire esclave supplicié. Le cas existe aussi dans l'église Saint-Étienne de Beauvais.

Nous aurons encore plus froid au CAP BLANC-NEZ. Il est vrai que nous sommes plus haut que sur le cap précédant, puisque nous sommes entre 134 et 151 mètres. Malgré cela, la curiosité nous aidera à faire le tour à pied du site. Près de là, vers SANGATTES, la BATTERIE LOURDE LINDERMANN était composée de trois batteries de canons Krupp SKC/34, chacun pesant modestement cent six tonnes. Ils pouvaient tirer des obus d'une tonne, à quarante kilomètres, sur les villes côtières du Kent. L'ensemble fut enseveli, en 1993, sous les boues liquides venant du percement du tunnel sous la Manche.
En dessous du cap, le village d'ESCALLES (que nous ne ferons pas) abrite l'auberge " Le Thomé ", avec un petit musée en sous-sol. L'endroit évoque la mémoire d'AIMÉ THOME DE GAMOND, ingénieur du XIXème siècle, qui consacra sa vie à un projet de tunnel sous la Manche.
Puis, ultime étape de notre excursion, nous ferons demi-tour à COQUELLES. Sur le rond-point, a été placé le TUNNELIER " T.A. VIRGINIE ", sorti du tunnel sous la Manche le 27 avril 1989.

Comme à chaque fin d'assemblée annuelle de l'ANEG, je me sens oppressé, car je sais bien que ce beau séjour dans le pays du nord se termine. Dans le car, à une amie qui me demande comment je ressens cette fin de voyage, la réponse vient du cœur : " Oui, c'est vrai, j'ai toujours le cafard à la fin des rencontres. Et je suis sincère ! ". Les temps de départs le lundi matin se prolongent toujours. On ne se quitte pas, on s'arrache plutôt pour ne pas rester encore un peu. Puis le quotidien va vite reprendre le dessus et vite, on va se remettre à compter les jours avant de se retrouver l'année prochaine pour bon nombre d'entre vous.

En espérant ne pas vous avoir ennuyé par ce récit tiré des quarante-quatre pages de notes documentées que j'ai rédigées à mon retour à Rouen, pour parodier un célèbre film récent sur les ch'tis, je peux affirmer ceci : " Quand on ne connait pas le Nord, on n'a pas envie d'y venir. Mais quand on le connaît, on a souvent envie d'y revenir ".

Et encore une fois, les remerciements pour tous ceux qui ont organisé ces rencontres 2011,
si on devait les mettre en tas, il y aurait un nouveau terril minier dans le Nord.


Mes bisous à vous tous, mes frères et sœurs,
ne viennent pas du pôle nord,
car ils sont chauds.


Dans l'impatience de vous revoir,
il est 22h30, ce jour 3 septembre 2011.

Dominique SAMSON



1) - Compte rendu du séjour du 10 au 12 juin 2011
par Josiane van Mierlo-Mauchauffée.

Allocution de Marie-Cécile

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