Deutschlandlied - Chant des Allemands
Deutsche Fahne
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
WART-ALTENSTEIG,
le 11 juin 2010.



Baden-Württemberg

Wappen von Wart

2) - Compte rendu du séjour du 11 au 13 juin 2010
par Dominique Samson.

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De la forêt de Roumare à la Forêt-Noire.

La forêt de Roumare, cela ne vous dit peut-être rien. Et si je vous parle du Schwarzwald, vous séchez toujours ? Sachez qu'il y a quelques six cent cinquante cinq kilomètres entre les deux endroits, celui d'où, en juin dernier, je suis parti et celui où je suis arrivé pour un séjour mémorable.

Dans la forêt de Roumare, près de Rouen, il y a des cantiliens (habitants de Canteleu) faisant partie de la grande famille de l'ANEG, très habiles et rassurants chauffeurs, et beaucoup d'arbres. Dans le Schwarzwald (nom allemand de la Forêt-Noire), de l'autre côté du Rhin, il y a un petit, mais très charmant village, Wart, près de la ville d'Altensteig, et tout autour beaucoup d'arbres. Pendant quatre jours, nous y avons rencontré de joyeux lutins, beaucoup venant de France. Et je peux vous confirmer que croiser ces lutins-là n'engendre pas la mélancolie. On m'avait parlé de la ligne bleue des Vosges. Moi, j'ai trouvé de l'autre côté du Rhin une ligne rose, cette couleur qui donne un optimisme, une sérénité à la vie, lorsqu'un anégien rencontre un autre anégien. Et puisqu'on parle d'arbres, avez-vous bien observé la morphologie de ces grands végétaux ?
À la base, il y a des racines, ancrées solidement dans la terre de nos ancêtres. Il y a un tronc sur lequel on peut s'appuyer. Puis, en hauteur, partent les branches, parfois tendues dans un geste de prière vers le ciel, se déformant selon les contraintes environnementales, mais toujours dans une attitude de croissance. Et sur ces branches, poussent des feuilles de toutes sortes, toujours renaissantes, et dont l'ensemble forme un abri où l'on peut se protéger du soleil ardent ou des intempéries. Et à cet instant de ma prose, je vois clairement l'image de l'ANEG à travers celle de mon arbre. Car les pins de la Forêt-Noire, comme ceux de l'Alsace, repoussent toujours sur une terre qui a été désolée, comme nous grandissons à l'ANEG, après une vie qui n'a pas toujours été un long fleuve tranquille.

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Donc, ce matin du jeudi 10 juin 2010, nous quittons la Normandie, de bonne heure et de bonne humeur. Sur la route, quelques noms inscrits sur les panneaux routiers montrent combien il a fallu de tragédies pour comprendre que l'amitié et la compréhension entre les peuples est une valeur beaucoup plus sûre que l'affrontement guerrier pour savoir qui est le plus puissant, le plus intelligent ou le plus beau : "Les Eparges", "Verdun", "Gravelotte, bataille de 1870", etc... Dans une guerre, les arbres abattus sont replantés, la nature repousse. Jamais une vie humaine stoppée par une balle. Mais nous n'allons pas relire de sombres pages noires, mais pendant notre séjour écrire de belles pages d'amitiés, de clarté, d'espérance, de concorde. La preuve, c'est qu'après avoir dépassé Reims, le ciel s'éclaircit. Nous traversons la "frontière" au nord-est de Strasbourg, en franchissant d'abord le Moder, puis le Rhin. Pas de douanier en vue, pas de contrôle, pas de barrière. Quelque soit l'endroit de l'Europe où nous arrivons, c'est maintenant "chez nous". Nous ne craignions rien non plus, car la seule drogue que nous transportons est celle qui est tapie au fond de notre cœur et que l'on nomme "ASL", qui nous fait mieux vivre maintenant que nous la consommons tous dans notre chère amicale. Vous n'avez jamais essayé l'ASL ? "Amitié Sans Limite" ?

Nous voilà donc en Allemagne, direction Baden-Baden, vu très rapidement en passant. Nous n'y goûterons pas les eaux chlorurées sodiques. Des eaux plus vivifiantes nous attendent.
Nous grimpons dans la Forêt-Noire. Gernsbach, puis Reichental, très joli et typique village avec ses maisons en bois, ses fresques sur les murs, Kaltenbronn, etc... Je n'ai pas assez d'yeux pour regarder et je vais user la vitre de la voiture. Les vallées sont profondes, les pins aux fûts minces mais très hauts montent vers le ciel pour attraper la lumière. Et la route tourne, tourne, à en donner le vertige. Heureusement, le chauffeur n'a pas encore abusé de la bonne bière allemande. Le GPS parfois lui indique trop rapidement de tourner à gauche ou à droite et nous avons ainsi quelques difficultés à discerner une route reliant un village à un autre avec une route forestière. Mais nous prenons tout cela avec humour. Enfin, le GPS nous amène bien au Schwarzwald-Bäderstrabe, pile devant l'hôtel Sonnenbühl de Wart, à 6 km au nord-est d'Altensteig, toujours sous le soleil, ce qui nous surprend tous et plus facilement que pour écrire ces noms de lieux auxquels je ne suis pas habitué. Nous avons donc déjà un aperçu de la forêt et ce qui est paradoxal, c'est qu'aucun arbre ne l'a cachée.

Un peu indécis au début, ceux qui, comme moi, ne maitrisent pas la langue de Goethe essayent de se faire comprendre de nos hôtes allemands. Mais avec patience et grands sourires, ces derniers arrivent à transformer notre arrivée chaotique en accueil très chaleureux. Bien vite, tout le monde prend ses repères, saisit la géographie des lieux. Ce n'est partout, dans le hall et les couloirs, que mines réjouies et joues qui se musclent sous l'effet des embrassades. Je vois qu'il y a une piscine, salle de massage, salle de sports dans l'établissement. Qui va oser y aller en premier ?

Je découvre la grande chambre qui m'est réservée, tout intimidé d'occuper un tel espace. Et la luxueuse salle de bains, c'est Françoise, mon épouse, qui voudrait bien d'un tel aménagement chez nous. Calme-toi, Dominique, sinon tu vas te prendre pour un émir en déplacement en Forêt-Noire.
Le diner du jeudi soir est pris en commun dans une grande salle et il fait chaud, dans les cœurs aussi. Le personnel est très gentil et il faut qu'il insiste un peu pour que les derniers et bavards occupants libèrent la terrasse, dehors, alors que la nuit est tombée depuis un bon moment. Trop curieux, je décide de faire une balade nocturne dans le village voisin avant de me mettre dans le lit (où il y a de la place pour quatre).

Dans la pénombre, je repère quelque chose qui m'étonne beaucoup. Devant une maison où est indiqué "Puce/Market" (je comprends vite qu'il s'agit d'un brocanteur vendant un peu de tout), toute une collection de poteries et d'objets agricoles anciens sont exposés et laissés sans surveillance la nuit sur le trottoir. En France, tout cela aurait vite été subtilisé sans vergogne. Je suis un peu inquiet aussi pour un couple qui n'est pas encore arrivé à l'hôtel, perdu en voiture dans la forêt, ne parlant pas l'allemand et ne voyant pas bien de nuit les panneaux indiquant la direction de notre oasis. Vont-ils devoir passer la nuit dans leur voiture. Hélas, c'est ce qu'il se passera et ce pourrait être presque comique si ce n'était pas très inconfortable et angoissant, presque arrivés devant l'hôtel Sonnenbühl. J'ai presque honte de me glisser dans ma couette en pensant à eux.

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Nous sommes le vendredi 11 juin 2010. Bien qu'un peu fatigué, la curiosité remplace mon réveil et à 6h30 du matin, je me demande pourquoi, je suis déjà debout devant la fenêtre, bien que je sache la réponse pour bien connaître le bonhomme qu'est votre rédacteur. À trois cents mètres environ, je vois un mur de sapins, annonçant l'immensité de la forêt. Combien de mystères cache-t-elle ? Combien de légendes peut-elle raconter ? Combien recèle-t-elle d'histoires. J'ai l'impression bizarre qu'un génie sylvestre me fait un clin d'œil par lequel il me montre combien l'aventure de la découverte est proche. Bien sûr, si je me perds, cela sera bien une aventure digne d'un audacieux explorateur pénétrant la forêt tropicale inconnue, violant son intimité, déjouant tous ses pièges pour retrouver mon chemin. Plus modestement, je vais me contenter d'une visite au village de Wart, même si le ciel a méchamment décidé de mouiller ces visiteurs venus de loin.

Des petites fermettes, non barricadées, donnent directement sur la rue et à un moment, j'hésite, ne sachant pas si je suis sur une chaussée communale ou à l'intérieur d'une ferme, car il y a un bâtiment agricole sur ma droite et un gros tas de fumier sur la gauche. Les deux hypothèses sont vraies. Un âne me salue au passage, mais je n'ai pas différencié la langue du braiment. J'aime les ânes avec leurs yeux doux, ceux à quatre pattes, pas ceux à deux pattes. Sur un gros rocher, non loin de la place du village, est fixée une plaque de bronze avec le portrait du maréchal Hindenburg dessus. Mais il n'y a pas d'explication sur la présence de cet objet historique. Ce qui me frappe également, c'est le soin avec lequel sont stockés les stères de bois pour l'hiver, dans les parcelles. Isolé du sol, l'ensemble est constitué de cases où dans chacune est inscrite la date de la coupe, le tout protégé de la pluie. Le plus grand, tout en longueur, comporte onze compartiments. Tout cela donne une impression d'ordre et de solidité.
L'église est fermée. Heureusement, le cimetière réserve une belle découverte historique et patrimoniale, que je signale aux anégiens que je croise. Oui, il n'y a pas que les français qui ont souffert de la première guerre mondiale ou qui, après, ont érigé des monuments aux morts. Les allemands aussi ont vécu une grande tragédie. Un premier gros bloc de grès rose supporte une plaque de bronze où sont gravés les noms des hommes de Wart tués entre 1914 et 1918. Une deuxième plaque de bronze représente ce qui semble être une mère éplorée tenant son fils agenouillé. On ressent la douleur devant ce monument. Un deuxième monument à quatre faces, de grès rose aussi, supporte la représentation sculptée de l'équipement d'un militaire (sac à dos, fusils, casques, couvertures, etc...). Le cimetière est très bien entretenu, bien fleuri. Au contraire des cimetières français que je visite souvent, je n'ai pas vu de tombes disloquées par le temps et l'oubli. Devant la chapelle, un préau protège judicieusement de la pluie un pupitre où l'on peut prononcer une homélie lors d'une inhumation. Décidément, ils pensent à tout, nos voisins d'outre-Rhin !

L'après-midi sera consacrée aux assemblées générale et extraordinaire dans la grande salle amphithéâtre du centre de congrès, proche de l'hôtel. Je ne vais pas narrer tout ce qui s'est dit, échangé, approfondi, projeté. Les rapports d'assemblées vous éclaireront mieux que moi sur le déroulement de cette manifestation annuelle très importante pour notre association. Comme pour toutes les précédentes, le récit de retrouvailles entre familles françaises et allemandes sont toujours une source de grande émotion.

Néanmoins, je rappellerais quelques points qui me paraissent illustrer la haute tenue de nos débats. Le "complexe du précédent" a été souligné. Les gouvernements de divers pays traduisent cela par un complexe de frilosité. Si on facilite les dossiers franco-allemands, les autres nationalités feront aussi les mêmes demandes. Certains états ne sont pas encore prêts à cela. Au nom de quoi devraient-ils refuser ces démarches ? Raisons politico-diplomatiques, raisons économiques ? (mais nous ne réclamons pas d'argent !). Il y a là un dilemme très sensible, très délicat, qui touche à l'humain, au devoir de réconciliation et à la justice universelle.
Un monsieur de quatre-vingt-treize ans, donc né en 1917, recherche toujours son père, soldat allemand. Pas seulement pour lui, mais pour transmettre une généalogie exacte, avant sa mort, à ses enfants ou petits-enfants. Nous n'insisterons jamais assez sur l'importance de la psychogénéalogie pour le confort mental des générations. Ce sujet nous concerne tous.

Le principe d'une association franco-allemande,
de type loi 1901, est accepté à l'unanimité.

C'est une étape très importante pour nous tous. Beaucoup d'enfants allemands recherchent aussi leurs pères français. Nous avons des problématiques communes. Notre association ainsi s'élargit tout en gardant sa spécificité de période historique et de territoire.

La sixième rencontre 2011 de l'ANEG aura lieu à Villeneuve-d'Ascq. Tournerons-nous un remake du film "Bienvenue chez les t'chis" ?. J'en suis d'avance certain.
Enfin, avez-vous remarqué le nouvel instrument indispensable qui ne quitte jamais les mains de notre chère présidente ? Pour n'avoir pas à crier pour rameuter tout son petit monde et faire silence, pour n'avoir pas ainsi une voix de crécelle, rien de mieux que d'agiter l'instrument du même nom. Mais je ne suis pas d'accord avec la définition du "Petit Robert". Janine est certes bavarde, mais elle n'a pas la voix désagréable.

Il aurait bien fallu, par contre, une grosse crécelle pour avoir moins de bruit au repas du soir. Mais que de paroles à délier quand on ne s'est pas vu depuis douze longs mois.
Une plus belle surprise nous attendait ce soir-là. En effet, dans la grande salle du centre de congrès, nous ne sommes pas seulement intrigués par le tentateur buffet qui attend d'être pris d'assaut par quelques appétits bien établis (on connaît les réputations à l'ANEG !).


© Photo (1) : C. Rumpler - 11/06/2010

Que peuvent bien manigancer Janine qui se glisse furtivement plusieurs fois derrière le grand rideau de scène, Pierre qui rôde avec de grands airs de conspirateur, Laurent qui semble stressé, comme un acteur ayant le trac avant une grande première ?

Le secret était bien gardé. Après une belle projection, réalisée par Pierre, rappelant les cinq années passées de notre association, un nouveau venu se présente. Et quel présent ! Il était attendu, mais nous ne savions pas qu'il était arrivé incognito parmi nous. IL, c'est le livre de l'ANEG, Des fleurs sur les cailloux, réunissant trente-six contributions de frères et sœurs et celle de notre précieux éditeur et grand ami Laurent Guillet. Quel auteur ou quel éditeur rêverait de voir l'enthousiasme et presque la bousculade pour avoir un exemplaire d'un livre fraichement paru ? Tous bien sûr. Nous, nous ne rêvons pas. Nous serrons comme un précieux trésor ce recueil de témoignages qui va retarder l'heure où les anégiens, ce soir, vont tomber dans les bras de Morphée.
Et la séance de dédicaces par les auteurs est, dans la foulée, digne d'une réunion de vedettes du spectacle. Nous souhaitons beaucoup de lecteurs à ce nouveau-né et d'autres frères à venir.

À la table de notre célèbre éditeur.
© Photos (4) : 11/06/2010

Remise des livres aux invités d'honneur par notre Présidente.
© Photos (3) : J. Sauval-Schmutzler - 11/06/2010

Très longue séance de signatures-dédicaces.
© Photos (3) : 11/06/2010

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Samedi 12 juin 2010, 9 heures. Branle-bas de lève-tôt et de retardataires, devant l'hôtel. Deux beaux autocars nous attendent. Les responsables de cars comptent et recomptent. On a le droit de perdre le nord, mais pas les inscrits à l'excursion de la journée. Direction Wolfach, sur la rivière "Kinzig" qui le traverse, à soixante-sept km au sud-est de Wart. Nous visiterons une verrerie, le "Dorotheenhîîtte Glasmuséum". C'est la dernière verrerie artisanale de la forêt Noire, produisant de très beaux verres en cristal. Comme en Lorraine ou en Normandie, la présence d'une verrerie s'explique par celle environnante de la forêt. Pour réaliser un verre en cristal, il faut brûler un m3 de bois. La pratique du métier de verrier n'est pas anodin. Il faut souffler dans une canne sans se brûler les poumons avec l'air chaud, on utilise de l'oxyde de plomb, le verre en fusion est à 500 degrés et il dégage des ultra-violets dangereux pour les yeux. Les étapes de la fabrication du verre nous sont expliqués avec force détails, tout en parcourant les ateliers. Certains même sont invités à participer à la réalisation d'un verre. Quand je dis qu'à l'ANEG, on apprend plein de choses...

Nous sommes ébahis par la dextérité des graveurs sur verre. Ils les incisent sans faire éclater le verre, d'un geste sur et rapide. Le dessin à obtenir consiste à entailler une première couche de verre coloré pour atteindre la deuxième couche de verre transparent. Puis, mais on s'y attendait un peu, passage obligé par le magasin où les porte-monnaie pourront ouvrir leur bouche si leurs maîtres sont tentés par un achat. Dehors, le pourtour de la verrerie est décoré de sculptures en bois, grandeur nature, réalisées à la tronçonneuse. Il y a l'aigle, la chouette, un ours qui essaye de nous effrayer, mais n'y arrive pas, un couple d'amoureux tendrement enlacés. Mais le plus remarquable est l'ensemble de personnages et d'animaux représentant la venue des trois rois mages devant la crèche. Il y a l'odeur de la sciure, mais pas celle de l'encens. Dommage. Mais en Orient, il y a peu d'arbres. Là, les sapins touffus et les pins altiers nous toisent de partout, sur les pentes du Schwarzwald. Tout comme les deux oiseaux de bois qui surveillent, de chaque côté d'un banc, mes amis de Canteleu assis devant un panneau vantant les attraits de l' "Euro-Park". La plupart des visiteurs vont rester sur place pour se restaurer. Mais comme je n'ai pas les yeux en bois, j'ai déjà repéré qu'à un km, le village de Wolfach semble plein d'attraits. Je ne serais pas déçu du voyage. Ce ne sont que de belles maisons typiques, aux tons pastel. Sur une place, avant de franchir un pont, un groupe sculpté en bronze représente de curieux personnages, avec des chapeaux pointus, certains jouant de la musique. Sans doute les habitants mystérieux de la forêt, timides car on ne les voit jamais, alors qu'on m'a certifié qu'ils existaient bien (dans les rêves ou les contes de fées ?).
Devant la très belle mairie décorée de fresques, une rue centrale, toute en pavés, coupe le centre du village et dessert les divers magasins, dont deux beaux "Apotheke" (pharmacies). Sur un monument commémoratif fait d'un rocher de grès, trône un superbe aigle de bronze. Mais je n'arrive pas à comprendre le texte de l'inscription en bronze scellé en dessous, avec le portrait d'un homme. Assis à la terrasse d'un café, je m'aperçois que je suis le seul français dans le secteur. Mais curieusement, je suis envahi par le sentiment d'être bien, serein, pas dépaysé, l'impression forte d'être dans un endroit familier. Mes racines biologiques intuitivement seraient-elles en train de me causer ?

L'après-midi, nous visiterons le "Freilichtmuséum vogtsbauernohf" (écomusée de la Forêt-Noire) à Gutach, au sud de Wolfach. Le beau soleil est revenu, mais pour combien de temps ?

L'écomusée existe depuis 1964 et abrite les différents types d'habitations de la région, surtout des fermes, qui ont été remontées et restaurées dans le parc. S'y ajoutent la présentation de nombreux objets utilitaires et meubles de la Forêt-Noire et tous les métiers locaux. Une merveille encyclopédique et ethnographique pour bien saisir la réalité de la vie des anciens habitants.
Je ne pourrais faire l'inventaire de tout ce qu'il y a à voir dans ces espaces. Citons les plus remarquables. La ferme Hippenseppenhof date de 1599, couverte entièrement de tuiles de bois. Je suis étonné par la noirceur des murs de la cuisine. J'imagine les pauvres femmes devant les marmites, les yeux et les poumons irrités par la fumée des fourneaux. Devant la ferme, se trouve la chapelle toute en bois, datée de 1736. Nous visiterons ensuite le grenier de la Forêt-Noire, construit vers 1590 et isolé du sol à un demi-mètre. Il y en a aussi deux autres dans l'écomusée. Nous passerons à la maison des journaliers (1819), la maison du Schauinsland, copie de celle de 1730, qui n'a pu être démontée. Suivront la ferme Falkenhof (1737), la maison du Hotzenwald, copie d'une ferme de 1756, la ferme Vogtsbauernhof (1612) qui était déjà en ce lieu depuis l'origine du parc, la ferme Lorenzenhof (1608). Nous n'oublierons pas les fournils, la brûlerie permettant de fabriquer l'eau de vie, Et moi qui suis passionné par le patrimoine industriel, mon attention se porte particulièrement sur la scie "à bloc" du Moyen-Âge, la scie alternative verticale (1828), le broyeur de chanvre, la martellerie, le moulin à céréales (1609). Avant 1930, il y avait mille moulins dans la Forêt-Noire. Il n'en reste plus que trente. Il y a même la maisonnette du rentier (1652), bâtiment destiné à loger les vieux paysans qui ne pouvaient plus travailler. Voilà le genre d'édifice qui va connaître un regain dans notre société actuelle.

Les matériaux de construction sont locaux : la terre pour le torchis, la paille, le chaume récolté dans la vallée (il faut le changer tous les soixante ans), les bardeaux de bois de la montagne. Seuls les roseaux viennent de Hongrie et le bois de mélèze de Russie.

La salle commune est seulement chauffée. Les propriétaires dormaient au-dessus. Les domestiques dormaient au-dessus de l'étable. L'érection de croix dans le parc est incongrue, car les propriétaires, à l'origine, ne voulaient pas la présence d'une croix catholique dans une vallée protestante.

Une tête de taureau, dans ungrenier, nous intrigue. Il était utilisé pour tirer le bois de charpente. Après, on le tuait et on mettait sa tête sous la charpente pour protéger la ferme de la foudre. Les enfants avaient des imperméables faits de fibres de paille lorsqu'ils gardaient les vaches et qu'il pleuvait. Vous avez sans doute vu aussi la superbe couronne de mariée, appelée "Schäppel" faite de perles et de boules de toutes les couleurs.

Ce fut une merveilleuse visite, un retour dans le passé mais sans nostalgie, une belle source d'étonnements pour nous tous. Et partout, nous nous guidons en percevant le rire de notre présidente et nous nous rassurons de sa présence.

Le soir, pendant et après le repas, nous serons charmés par les mélodies interprétées par un musicien en tenue locale. Et à voir les chenilles tourbillonner autour des tables, on oublierait que nos anégiens ont beaucoup marché aujourd'hui. La soirée sera longue, très longue, pas seulement pour nous, mais aussi pour les serveuses très patientes qui veilleront avant de pouvoir débarrasser les tables.

Le musicien animant le repas.
© Photos (2) : J. Sauval-Schmutzler - 12/06/2010

Autour d'un sympathique dîner...
© Photos (3) : 12/06/2010

... et vive la chenille !
© Photos (6) : 12/06/2010

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Dimanche 13 juin 2010. Hélas, tout a une fin, comme la dernière page d'un bon livre. Je dois rejoindre mes forêts de Normandie. Je ne connaitrais Altensteig, la ville la plus proche, que par les dépliants touristiques que j'ai recueilli à droite et à gauche, papiers informatifs fabriqués grâce aux fibres des arbres, imprimés avec de l'encre noire alors que la forêt qui nous entoure, contrairement à son nom, est bien verte, comme celle près de Rouen, mais dont la couleur lui a donné son nom.

Une dernière anecdote pour la route. Au retour, à une station-service allemande, nous croisons un motard qui ne passe pas inaperçu. Son casque est celui de l'armée allemande, pendant la deuxième guerre mondiale. Est-il homologué ? Le porterait-il en France ?
À l'aire de repos de Verdun-Saint-Nicolas, sur l'autoroute A4, un monument aux derniers poilus a été inauguré pour le vingt-cinquième anniversaire de la rencontre des présidents Mitterand-Kohl, le 22 septembre 2009.

Rappelez-vous, le 22 septembre 1984, la poignée de mains des deux hommes devant le mémorial de Douaumont. Ce courageux geste a été un formidable message de paix, d'amitié et de réconciliation, modèle qui devrait être multiplié sur notre planète, mais ce n'est sans doute qu'un illusoire rêve.

Helmut Kohl - François Mitterand
Visite des champs de bataille de Verdun
Besichtigung der Schlachtflder bei Verdun
22. September 1984.


Je tiens aussi à remercier, toutes celles et ceux qui ont oeuvré pour la réussite de cette formidable "Assemblée générale", sans oublier Fernand et Rudy qui ont organisé sur place, ces trois jours merveilleux dans notre "Patrie allemande".

Au fait, est-ce qu'il y a des forêts autour de Villeneuve-d'Ascq ? Je le saurais en 2011.
En attendant, je vais m'ennuyer de vous tous.
Je ne vais pas pleurer. Je ne suis pas un saule pleureur, mais un hêtre de charme...

Rouen, de mon arbre perché,
le 4 novembre 2010.

Dominique SAMSON



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