CONGRÈS DES ASSOCIATIONS FRANCO-ALLEMANDES,
du 23 au 25 septembre 2011.


Compte rendu
par Josiane van Mierlo-Mauchauffée.
*

Le lac et le Rathaus de Kiel.
" Le 56è congrès des Associations franco-allemandes s'est tenu à KIEL ",
du 23 au 25 septembre 2011.
L'ANEG y a participé. Soit... mais où est-ce, Kiel ?


Eh bien : prendre tout d'abord l'avion pour Hamburg : une heure vingt d'un vol sans histoire depuis Paris-CDG, sur une compagnie nationale germanophone, afin de se mettre " dans le bain ". Puis, après la trouée d'une dense couche nuageuse, d'un gris sale peu engageant, un atterrissage maussade sous une pluie battante : le tarmac lui-même luit comme un miroir ! Brrr... ça commence mal ! L'Allemagne du Nord, j'aurais dû me méfier : ai-je au moins un parapluie dans la valise ? Ensuite, chercher le logo vert du S-Bahn dans le hall d'arrivée ; mais auparavant, brancher correctement le décodeur cérébral pour demander en allemand un ticket trajet unique pour Hamburg, s'il vous plaît. Auriez-vous un plan de la ville ? Merci beaucoup. Le démarrage des neurones est toujours laborieux ! Enfin, en train style " Corail ", traverser du sud au nord le Land de Schleswig-Holstein (à prononcer avec une pomme de terre brûlante dans la bouche, si, si !) vers la mer Baltique.
Verte plaine aux grasses prairies, où paissent les solides vaches noires à taches blanches ; plat, plat, PLAT à l'infini, avec des éoliennes majestueuses entre les bois de bouleaux argentés, des fermes trapues au milieu de bocages presque bretons... Le Land est jumelé avec la Région " Pays de la Loire ", et la ville de KIEL avec celle de BREST : on ne pouvait mieux trouver. Car à peine sort-on de la Gare Centrale que d'énormes ferrys, hauts comme des immeubles, barrent l'horizon. Le port de Kiel est, en effet, le poumon allemand vers la Baltique, le pont maritime avec les États nordiques, Danemark, Suède, Norvège.

Et puis... est-ce un clin d'œil de mon ange gardien allemand ? Voici que les nuages se dispersent, le soleil apparaît, comme un souhait de bienvenue : il va régner sur la région, durant tout ce congrès, une température estivale qui réjouira les habitants, sous un ciel intensément bleu.

Ferry à Kiel.

Vue générale de Kiel.
Mais je ne suis pas missionnée à Kiel pour faire du tourisme : venons-en donc aux choses sérieuses. Le titre est explicite : l'ANEG est bien une association franco-allemande ; de plus, elle appartient à la Fédération des associations franco-allemandes françaises, la FAFA, il est donc logique qu'elle soit représentée. La FAFA possède une jumelle allemande, qui porte le même nom, mais en allemand, bien sûr : VDFG (Vereinigung Deutsche-Französicher Gesellchaften). Bon, les choses sont claires, il ne me reste qu'à retrouver notre ami Theodor Jakumeit, qui va porter avec moi les couleurs de l'ANEG au long de ces quatre jours, au titre des Anégiens allemands.

Les deux fédérations, allemande et française, se réunissent chaque année, alternativement dans l'un ou l'autre pays, pour un séminaire de travail et de réflexion. Cette année, c'est donc l'Allemagne qui reçoit à Kiel, en 2012 ce sera au tour de la France d'accueillir ses hôtes, dans la magnifique et royale Nancy.

M. le Président Gérard Thieser et Josiane Mauchauffée.
© Photo : Theodor Jakumeit.
De gauche à droite :
Mme le Dr Christ, Théodor Jakumeit et Josiane Mauchauffée.
© Photo : Theodor Jakumeit.


Son Excellence M. l'Ambassadeur de France,
Mme le Consul Général et Josiane Mauchauffée (à droite).
© Photo : Theodor Jakumeit.

Chacune des deux fédérations comporte un bureau, avec Président et Vice-Président. Pour la FAFA, c'est M. Gérard Thieser qui veille au bon fonctionnement de sa fédération, avec compétence, dévouement et une exquise urbanité : Mme Madeleine Schmeder, Secrétaire Générale, l'accompagnait à Kiel. La VDFG était représentée par son Président, le Docteur Gereon Fritz, et sa Vice-Présidente, Mme le Docteur Margareth Mehdorn, tous deux francophones émérites.

M. le Président, Dr Gereon Fritz
et Josiane Mauchauffée.
© Photo : Theodor Jakumeit.
Mme la Dr Annette de la Motte
et Theodor Jakumeit.
© Photo : Theodor Jakumeit.

Le congrès est l'occasion de procéder aux A.G de la FAFA et de la VDFG, mais aussi d'écouter les experts invités à prendre la parole sur tel ou tel des sujets pressentis. Le thème général de ce 56è congrès s'intitulait : " créer des réseaux interculturels en Europe, un défi pour les associations franco-allemandes ".

Tandis que le jeudi 22 septembre fut consacré aux discours de réception (par la Présidente de la ville de Kiel, la Présidente de l'association franco-allemande du Land de Schleswig-Holstein, Mme le Dr Annette de la Motte, puis le ministre de l'Éducation du Land et les deux Présidents de la FAFA - VDFG), le vendredi 23 nous permit d'entendre M. le Consul Général de Pologne à Hambourg, Mme la Secrétaire générale de l'OFAJ -office franco-allemand pour la Jeunesse-, ainsi que plusieurs personnalités éminentes du domaine politique ou associatif. La question débattue concernait " l'effet que le travail de nos associations peut avoir sur les tiers ".

Il apparaît clairement que les jeunes générations (dont certains membres étaient présents et donnaient leur avis), donc la " relève " pour l'Europe de demain, ne sont plus du tout concernées par la " réconciliation " chère à leurs aînés. Pourquoi vouloir se " réconcilier " avec des pays qu'ils ont toujours connus amicaux (France, Allemagne) ? On se réconcilie après une brouille, une rupture : ils n'en ont pas vécu entre nos deux pays ; notre idée fixe de " réconciliation " leur semble donc obsolète. Il faut alors trouver d'autres moteurs pour les inciter à maintenir vivace cette amitié : comment rendre attractives la France ou l'Allemagne, face à la concurrence alléchante de l'Espagne ou de l'Italie, ensoleillées et " bon marché " pour les touristes. On note, tant en France qu'en Allemagne, une désaffection profonde pour l'étude de la langue de " l'autre " : les jeunes Allemands, en grande majorité, choisissent le couplé " anglais-espagnol ", voire " anglais-chinois ou anglais-russe " plutôt qu'anglais-français. La situation est, hélas, totalement similaire en France, malgré les efforts de quelques chefs d'établissements pour ouvrir ou garder une section d'allemand LV1.

Depuis 1991, les accords tripartites Allemagne-France-Pologne ont créé le Triangle de Weimar, espace de relations privilégiées entre les 3 pays : il faut absolument développer ces liens, et les étendre aux ex-pays de l'Est (Moldavie, Tchéquie etc.). Bref, il est primordial de relancer très vite l'engouement pour l'amitié franco-allemande, si l'on ne veut pas la voir se déliter et tomber dans la banalisation et, à terme, l'indifférence.

Un espoir cependant : il semble qu'au plan politique, le tandem franco-allemand (le mot " couple " suscite là-bas des commentaires volontiers ironiques et moqueurs) ait le vent en poupe : normal, me direz-vous, à Kiel ou à Brest ! L'analyse des intervenants allemands est la suivante : peu à peu, ces deux puissances (France et Allemagne) ont pris, en Europe, une place économique prépondérante et indiscutable. C'est désormais toujours ce tandem qui monte en première ligne, de concert, propose des solutions potentielles, que les autres États de l'UE peuvent ensuite discuter, amender, rejeter. Ces derniers attendent docilement ces propositions, ces impulsions, et demeurent dans l'expectative et l'immobilisme si elles ne se manifestent pas.

En quelque sorte, il est indéniable que le tandem franco-allemand
est à la tête de l'Europe, dont il est devenu le moteur.

À affiner, peut-être ?

Le samedi 24 septembre nous a vus " plancher " sur ces problèmes, répartis en quatre ateliers :
n°2 : " créer des coopérations innovantes " (associations-entreprises par exemple)
n°3 : " apprendre une langue, qu'est-ce ? Expériences de l'inter culturalité ".
n°4 : " Blogs, Facebook, Twitter : les associations franco-allemandes et les comités de jumelage à la découverte des réseaux sociaux ".
n°1 : " associations et comités de jumelage, précurseurs d'un vivre ensemble européen ". De nombreuses piste de travail et de réflexion en ont émergé, des idées ont foisonné : il reste à les mettre en application.

Les deux missionnaires de l'ANEG (sans soutane ni robe de bure) ont participé à l'atelier n°1. La veille, en assemblée plénière, devant un amphithéâtre comble, Theodor Jakumeit et moi-même avions été invités à présenter notre association. Les participants ont soudain découvert, en chair et en os, deux de ces mythiques Enfants de la Guerre dont parlent les médias ! Très ému à l'évocation de toutes nos enfances traumatisées, M.Fritz, le président de la VDFG, a tenu à nous accueillir officiellement dans sa fédération : l'ANEG est donc " membre d'honneur " de cette dernière, les coordonnées de l'ANEG figurent dans son " légumier ", et nous sommes destinataires de son bulletin de liaison (en allemand, mais rien n'est parfait !). Theodor et moi avons donc profité de cet atelier n°1 pour montrer le rôle de " précurseurs d'un vivre ensemble européen " de nos adhérents. Car qui mieux que nous, les Anégiens, peut se prévaloir du titre de précurseurs en ce domaine ? Nous le sommes dans notre sang depuis plus de 60 ans, précurseurs de l'amitié franco-allemande. Bien plus : nous sommes les preuves vivantes et incarnées de l'Amour franco-allemand, qui dit mieux ?

Grâce à ces témoignages, au poids du mandat que nous portions, nous avons tissé à Kiel tout un réseau de contacts souvent prestigieux : de Son Excellence M. l'Ambassadeur de France en Allemagne, qui " suit notre dossier de près, et essaye de lire tous les livres qui paraissent sur le sujet ", à Madame le Consul d'Allemagne à Brest, en passant par de multiples " Professeurs-Docteurs " spécialistes de l'enseignement du français Outre-Rhin, ou des responsables français de comités de jumelage. Bien sûr, et c'est là le plus intéressant pour l'ANEG, une question nous a été très souvent posée: " Pourriez-vous venir présenter l'ANEG devant mes étudiants ? Dans les colonnes de mon journal ? Dans un colloque ? ". Si tout cela aboutit, on n'a pas fini d'entendre parler de l'ANEG des deux côtés du Rhin !

Dans l'avion qui me ramenait vers la France, au milieu de l'azur lumineux,
8 000 m au-dessus des nuages rebondis, je pensais à nos pères :

" Parfois, même si je n'y crois guère, j'aime imaginer tous nos pères de l'ANEG,
réunis quelque part sur un gros nuage cotonneux noir-rouge-or,
contemplant béats leur progéniture devenue si fraternellement amie...
Là, peut-être ? Dans ce cumulo-nimbus incendié par le couchant ? "

Me revenaient à l'esprit les paroles de l'Hymne européen, cette " Ode à la Joie " de Schiller
chantée la veille à Kiel, après " La Marseillaise " et le " Lied der Deutschen " :
" Joie, étincelle des dieux, tous les hommes deviennent frères, là où ta douce aile s'attarde..."

Puisse-t-elle alors s'attarder indéfiniment sur l'Europe, et sur le vaste Monde !


Josiane van Mierlo-Mauchauffée
Vice-Présidente
A.N.E.G. France


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"VIE DE L'AMICALE
Was sich so alles tut..."