ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

LE PUY-EN-VELAY,
le 12 juin 2009.

Compte rendu du séjour
du 12 au 14 juin 2009.

Photo J. Sauval - 13/06/2009.
*

DEUX OBJECTIFS FIXÉS POUR LA RENCONTRE NATIONALE 2009 DE L'ANEG :
RETROUVER DES AMIS ET DÉCOUVRIR UNE VILLE ET UNE RÉGION INCONNUES.

Le Puy-en-Velay, dans la Haute-Loire, vous aviez ouï ce nom avant le mois de juin 2009 ? J'aurais pu vous parler des monuments de Lyon où habite mon fils, du Mont Saint-Michel où j'ai rêvassé en traversant la baie; je vous aurais bien entretenu de quelques hôtels particuliers du XVIIe à Rouen ou d'un musée d'archéologie méditerranéenne à Paris, mais Le Puy-en-Velay, où est-ce exactement sur la carte de notre belle France ? Est-ce que seulement cette ville est desservie autrement que par une diligence ou une montgolfière ? Aussi, dès l'annonce officielle que l'Assemblée générale et la rencontre nationale de l'ANEG auraient lieu, pour l'année 2009, au Puy-en-Velay, les cartes poussiéreuses ont été sorties de mes archives, l'office du tourisme du Puy-en-Velay sollicité pour combler ce qui s'avèrera être d'impardonnables lacunes et Internet consulté comme une boule de cristal gonflant jusqu'à déchirer le rideau épais de mon ignorance.

Très vite, plusieurs solides évidences sont apparues : Le Puy-en-Velay n'est pas un trou perdu dans la France profonde et la ville offre de superbes découvertes touristiques pour un curieux comme moi. Rapidement quelques priorités de visites, selon mes intérêts patrimoniaux, ont été retenues. De plus, la région est très belle, intacte, authentique, vestibule pour d'autres contrées plus au sud évoquant surtout les vacances : l'Ardèche, les Cévennes, la bête du Gévaudan et, descendant plus encore, l'arrivée sur le Languedoc déjà iodé par les senteurs de la Méditerranée. La perspective d'aller aux sources de la Loire, au pied du Mont Gerbier-de-Jonc, fleuve mythique bordant de nombreux châteaux royaux tout au long de son cours, m'a enchanté, car c'était la cerise sur le gâteau de fraternité que représente toute rencontre de l'ANEG. C'était décidé : je serais au Puy-en-Velay, comment ? je ne l'avais pas encore prévu, à pied, en carrosse ou en montgolfière. Parallèlement, je pensais que de nombreux frères et sœurs étaient dans les mêmes sentiments en préparant ce séjour dans la cité des Velaves, ces redoutables gaulois qui occupaient jadis le Puy-en-Velay.

*

JEUDI 11 JUIN 2009.

Finalement, c'est en train, venant de Lyon, que le jeudi 11 juin 2009, j'ai longé la Loire, usant la vitre du wagon à force de coller le nez dessus pour mieux enregistrer le paysage par mes neurones appelés à la mobilisation générale. Ah, ce n'était pas le trajet du TGV, car le parcours ferré doit avoir autant de courbes que de kilomètres entre Saint-Étienne et Le Puy. Mais quel contraste déjà avec d'autres régions de France. La petite montagne semble vouloir presser le train de chaque côté, comme si celui-ci forçait l'entrée et l'intimité d'une propriété interdite. En contrebas, un peu d'eau circule entre les gros cailloux. La Loire aura droit à un peu plus de douceur lorsqu'elle mouillera, beaucoup plus loin, les bancs de sable. Et surtout, je me pose la question suivante : pourquoi tous les arbres sont couchés dans la rivière sur des kilomètres et des kilomètres. J'aurais la réponse plus tard, mais comme je n'aime pas les cachotteries, je vous la donne tout de suite : la fonte des neiges des plateaux du Mézenc, dont nous reparlerons plus tard, a produit de très fortes crues, l'hiver dernier, alimentées par un vent du sud apportant de fortes pluies. Heureusement que nos racines personnelles sont plus ancrées dans nos cœurs que celles des malheureux arbres dans les rives de la Loire, pas si sage, cette demoiselle, qu'il n'y paraît.

Enfin, me voilà arrivé à la gare du Puy-en-Velay. Déjà, je repère d'autres amis de l'ANEG sur le quai. Mon premier camp de base est juste en face : Étape Hôtel, où effectivement, je ne serais pas seul. Comme il est 17 h, que le soleil va se montrer fidèle pendant tout le séjour, je conclus rapidement que cela me laisse beaucoup de temps pour faire une première investigation de la vieille ville, la plus intéressante. À nous deux, Le Puy. Mais la cité moyenâgeuse ne se laisse pas découvrir facilement. Elle se mérite et exige de bons genoux, car partout, les ruelles sont surtout des montées, faites de gros galets noirs et blancs.

Je note déjà deux choses : le nombre d'établissements religieux et l'architecture d'influence byzantine. Le premier point s'explique par le fait que Le Puy-en-Velay est le départ de la route des pèlerins vers Saint-Jacques-de-Compostelle, en Espagne, la fameuse Via Podiensis. Et c'est l'évêque du Puy, Godescalc, qui fut le premier marcheur vers la cité ibérique, en 950 ou 951. Le deuxième constat indique le fait que de nombreux espagnols, au XIIe siècle, vinrent au Puy, amenant avec eux l'architecture mozarabe et la connaissance qu'ils avaient des autres architectures rencontrées lors des croisades. La ville haute du Puy, maisons et édifices religieux, est construite en basalte et en arkose. L'arkose, pierre d'origine volcanique comme le basalte, vient des carrières de Blavozy, un bourg niché dans l'effondrement d'un ancien volcan, à une dizaine de kilomètres à l'Est du Puy. C'est bien un village voué à la construction, car c'est là aussi qu'habitent Gérard et Éliane Trincal, qui ont remarquablement travaillé à la réussite de notre séjour au Puy, en négociant les hébergements, les repas et les transports pour nous tous, en nous accueillant avec chaleur, aussi forte que le soleil et en organisant les différentes visites touristiques. S'il manque du personnel à l'office de tourisme du Puy, Gérard pourrait faire un excellent guide-conférencier, érudit et passionné.

Mais il est l'heure d'aller dormir, la tête déjà pleine d'images, car demain la journée sera bien remplie. Une petite pensée, avant de se confier aux bras de Morphée, pour l'État-major de l'ANEG qui est déjà au domaine de Chadenac, à quelques kilomètres à l'ouest du Puy. Bonne nuit, les enfants... de l'ANEG.

Repas pris en commun par les premiers arrivants.
Demain sera le grand jour de l'A.G.


VENDREDI MATIN 12 JUIN 2009

Me voilà arrivé à mon deuxième camp de base, le domaine de Chadenac. J'y serais jusqu'au lundi prochain. Ce domaine, entièrement rénové en 1992, est un gîte d'étape et de vacances, également maison familiale pour tous ceux qui veulent se ressourcer et faire une coupure avec notre monde trop stressant, de trois ha, appartenant à l'Union catholique de plein air et des centres de vacances. Les soixante places ont été réquisitionnées par l'ANEG. L'accueil y est excellent, les sourires sont aussi nombreux que les fleurs qui tapissent chaque coin de ce petit paradis. Nous seront là comme des princes, choyés, dorlotés. C'est encore mieux qu'au Club Méditerranée...

Le matin, réunion du Conseil d'administration avant l'A.G.

Le matin, une mise en échauffement par la tenue d'un conseil d'administration règle les derniers détails de l'Assemblée générale de l'après-midi. Jeanine, ne stressons pas. Tout va bien se passer. En attendant, une mise en bouche par un repas sur place, autour de plusieurs tables rondes, permettra à chacun de se retrouver ou de faire connaissance, par roulements, avec d'autres adhérents et amis.

VENDREDI APRÈS-MIDI 12 JUIN 2009

La corvée de l'émargement, on fait la queue... jusque dans les escaliers !
Le vote de Madame la Présidente.

Ça se bouscule aux portes de l'espace Charles VII, à Espaly, dans la banlieue du Puy. Va-t-il manquer de chaises pour les cent trente trois personnes présentes à l'Assemblée générale ? La télévision allemande ARD va nous suivre tout au long du séjour, préparant une émission de 45 minutes, à l'automne prochain. Marie-Cécile Zipperling, notre fée à tous, est là, fidèle et émue. Fidèle aussi est Rudy, le frère allemand de Francis. Rudy nous proposera d'organiser la prochaine assemblée générale 2010 en Allemagne, en Forêt-Noire. Rudy, on ne te laissera pas seul organiser ce gigantesque travail et on est très sensible à ton initiative. Notons aussi la présence cordiale d'une adjointe au maire d'Espaly-Saint-Marcel et d'une conseillère municipale représentant le maire du Puy-en-Velay. Dans l'assistance, il semble y avoir plusieurs enfants nés en Allemagne et rapatriés en France. Je m'aperçois que je ne suis pas un rare enfant né d'un papa allemand prisonnier de guerre. Je me sens moins seul. Ce qui montre que les vécus sont très différents selon les adhérents et amis de notre association. Je ne pourrais nommer tous ceux qui sont présents, mais pour nous tous, chacun est une personne importante.

La télévision allemande ARD nous accompagnera pendant toute l'A.G.

Les discussions sont animées et il faut toute l'énergie des animateurs pour que la salle ne ressemble pas au fond sonore d'une rencontre de coupe du monde de football. Les questions portent notamment sur les adhérents qui se sentent isolés dans leur lointaine province, sur les difficultés que certains rencontrent dans la communication d'informations par les services d'archives, sur la double-nationalité franco-allemande, sur les généalogies allemandes qui intègrent un enfant français né de la guerre, sur les misères subies par certains ou par leurs mères. Ainsi, des mères françaises travaillant en Allemagne pendant la guerre, dont l'enfant était de père allemand, ont eu à subir la méchanceté de leur entourage, à leur retour en France.

Nous avons tous compris, depuis longtemps, que
la bêtise humaine mêlée à la médiocrité d'esprit, c'est-à-dire à la petitesse,
ne connaissait pas les frontières et que l'intelligence de cœur
est un continuel chantier, à reprendre tous les jours
.

Il ne faut pas se décourager et ce qui est rassurant à entendre dans l'assistance,
c'est le constat général de convivialité et d'humanisme
qui règne au sein de notre association.

La salle avant l'A.G.
La salle avant l'A.G.

La salle avant l'A.G.
La salle avant l'A.G.

Gilbert fait une émouvante intervention, en déclarant : "On ne dira jamais assez merci à notre présidente". Mais je ne pourrais citer ici tous les commentaires pertinents, techniques, sincères, qui ont été entendus au cours de cet après-midi. Et tout cela donne soif. Un apéritif, en présence d'élus locaux apportera une pause à nos cerveaux en ébullition. De la terrasse de l'espace Charles VII, nous apercevons à l'ouest le curieux sanctuaire de Saint-Joseph, achevé en 1918, en forme d'entrée de château-fort, entouré de deux tours, surveillé par la monumentale statue en béton de 22,40 m. de haut. À l'Est et plus loin, la chapelle Saint-Michel-d'Aiguilhe, juché sur son rocher à 82 m. de haut, semble nous inviter. Patience, demain les plus courageux monteront à l'assaut de ce remarquable et audacieux ouvrage d'architecture.

Le Conseil d'administration...
... suite (pas assez de place sur l'estrade).

Françoise, représentante des conjoints,
rendant compte des rencontres du 5 mai 2009,
au Ministère des Affaires étrangères et Européennes
et à l'Ambassade d'Allemagne à Paris.

Intervention des membres au cours de l'A.G.

*

Pour ceux qui n'auront pu s'exprimer, il restera le repas du soir, pris en commun au domaine de Chadenac, où certains d'entre nous découvrirons, en attendant ce bon moment, que la bière fabriquée au Puy-en-Velay est excellente.

Premier repas pris en commun par tous les participants, bien mérité après une journée fatigante !

Il y aura ensuite cette très judicieuse initiative qu'est une veillée d'échanges, plus intimiste, où les plus timides pourront alors témoigner, ouvrir leurs cœurs depuis trop longtemps muselés.

Après le repas, soirée d'échanges.

Je ne peux manquer de rapporter ici quelques propos émouvants ou pertinents:

. "Une dépense d'énergie incroyable pendant des années. Quand on trouve, c'est l'apaisement". ;

. "Le temps est contre nous, car les témoins disparaissent et dans vingt ans, on aura plus envie de chercher" ;

. "Nos témoignages, matériaux de mémoire vivante provisoire, sont des preuves à transmettre aux générations futures que la paix entre les nations est beaucoup mieux que la guerre. Car nos histoires auront moins d'acuité émotive au fur et à mesure que les générations passeront" ;

. "Nos vies sont une forme d'exotisme pour nos enfants qui voient que nos vies ne sont pas banales, mais complexes, que le blanc et le noir ne sont pas catégoriques. C'est comme cela qu'ils deviendront adultes" ;

. "Nous sommes des fusibles pour nos enfants. Chaque écart doit être sanctionné. En Allemagne, cela est pris très au sérieux. Les générations actuelles allemandes vomissent ce qu'ont fait leurs parents. Cela est récent, car avant, les structures étaient encore contrôlées par d'anciens néo-nazis".

Il y a des phrases entendues que mentalement on ne se rappelle pas, mais qui s'inscrivent dans notre subconscient, sortes d'échos fantomatiques qui vont guider ensuite nos réflexions et nos décisions. C'est un peu ce qui résulte de cette riche soirée.

Mais il va falloir récupérer des forces, car demain, nous allons faire chauffer nos jambes, nos appareils photos et ne pas omettre le chapeau de soleil, le stylo et le carnet de notes. Je n'inscris pas la bonne humeur, car je sais qu'elle est déjà là et que je suis sûr que personne ne va l'oublier. Le Puy-en-Velay, bientôt, n'aura plus de secret pour nous.


SAMEDI 13 JUIN 2009

Je ne sais pas si c'est un rayon de soleil qui est venu me caresser à travers la fente du rideau, l'impatience de voir les amis de l'ANEG autour d'un copieux petit déjeuner ou l'excitation d'un explorateur à la veille de découvrir une contrée inconnue, mais ce matin, je suis réveillé avant que ne sonne l'implacable sonnerie du réveille-matin. J'ai presque deux bonnes heures avant que le dernier retardataire descende, fébrile, dans la salle à manger. Je fais donc un grand tour dans la campagne, autour du domaine de Chadenac. Quelques vaches, étonnées du passage d'un si matinal promeneur, me suivent un moment, puis s'arrêtent dépitées, car je ne suis pas très causant. Le murmure d'un ruisseau gambadant dans les prairies m'enchante, quelques papillons dansent autour de moi, l'air est doux, bref la journée s'annonce de bonne augure. J'en profite pour remplir ma poche de quelques échantillons de pierres typiquement locales. "De l'attire-poussière en plus", va dire ma tendre épouse.

De retour, la salle à manger ressemble à une famille qui se retrouve, après une longue absence, pour un mariage. Ce ne sont qu'embrassades, gazouillements joyeux, yeux lumineux et sourires à faire fondre le plus endurci d'entre-nous. Il en sera ainsi à chaque moment de rencontre.

Les cars nous attendent pour la découverte du Puy-en-Velay. N'oublions personne, comptons-nous, repérons bien notre voisine ou voisin.



L'équipe de la télévision allemande ARD nous accompagne pendant toute l'A.G.

Les moins bons marcheurs prendront le petit train. Les plus téméraires seront à pied, certains ne se doutant pas encore de l'exercice physique qui les attend. Mais quand on est curieux comme moi, les mots "fatigue" ou "il fait trop chaud" sont exclus de la pensée. Comme la plupart d'entre vous, je ne veux rater le moins de choses possibles. Mais je ne vais pas vous commenter en détail la visite de la ville, les deux conférencières de l'office de tourisme et notre ami Gérard l'ont fait excellemment au cours de cette journée. J'ai déjà parlé du pèlerinage vers Saint-Jacques de Compostelle, de l'architecture générale de la ville. Je rappellerais plutôt plusieurs choses étonnantes que nous avons vu. La cathédrale est construite à l'emplacement d'un ancien dolmen, sur le mont Anis. La table de pierre, dite Pierre aux fièvres a été le lieu de miracles. Suite à cela, l'évêque Vosy confie à l'architecte romain Scutaire le soin de construire une église. En effet, si on s'allonge sur la dalle encore présente dans le sanctuaire, on peut être guéri de maladies, comme je l'ai vu faire, avec étonnement, par quelques touristes pélerins. Avez-vous essayé, mesdames ?

La "Vierge noire".

Autre curiosité dans la cathédrale, c'est la Vierge noire. Elle remplace une précédente vierge noire détruite en 1794, pendant la Révolution française. Cette vierge disparue a été décrite comme portant des inscriptions hiéroglyphiques ou méroïtiques. C'était donc une statue d'Isis ou une statue éthiopienne, transformée en Vierge. Ce cas de transformation ou de récupération religieuse n'est pas rare. Lorsque l'on regarde les statuettes d'Isis portant Osiris sur ses genoux, on est frappé par la ressemblance avec les vierges à l'enfant. Comparez également le plan d'un temple égyptien avec celui d'une classique église, vous serez étonné. Mais l'heure n'est pas à la théologie. Sachez aussi que vous avez monté un escalier de cent trente quatre marches pour accéder à l'église. Sans compter toutes les autres autour. Vous avez également aperçu la colossale statue de Notre-Dame de France, réalisée en 1860 avec cent dix tonnes de fonte venant de deux cent treize canons pris aux russes lors de la bataille de Sébastopol. La statue fait seize mètres de haut, vingt deux mètres soixante dix avec le piédestal.

Après avoir regardé sagement plusieurs remarquables façades Renaissance, nous arrivons au 6, rue Chenebouterie, devant la maison, dite du "Cagaïre", d'Antoine Astruc, aromateur de profession. Sur la façade du XVIe siècle, une sculpture montre ce qu'est un cagaïre, c'est-à-dire "l'homme qui est sur son pot de chambre". Non mesdames, ne vous parfumez-pas aujourd'hui...

Pire encore, rue du Chamarlenc, nous stoppons devant le siège de la joyeuse confrérie des Cornards, du XVIIe siècle, Les sculptures portent des cornes, indiquant que les cocus du Puy venaient se consoler en ce lieu. "Ah que ces cornes me vont bien sur un front comme le mien" est-il gravé sur la façade. Tiens, c'est curieux, les hommes font semblant de rire dans l'assistance... Chaque ruelle, chaque impasse est une découverte inattendue et instructive. Je vais finir par une note plus romantique. Savez-vous d'où vient le nom du Puy ?. Il vient de "Puys d'amour". C'est dans cette ville qu'ont été créés les fameux concours de poésie au Moyen Âge. L'académie de Saint-Mayol accueillait des étudiants venant de toute l'occitanie. Au Puy, est également né en 1180, Pierre Cardenal, un des plus grands poètes européens du moyen âge.

Repas du midi pris par de nombreux membres répartis dans deux salles de l'hôtel Bristol.

Mais arrive vite l'heure de manger. Certains iront au restaurant de l'hôtel Bristol, d'autres essayeront de trouver une table ailleurs. Quand à moi, un rapide sandwich et je fonce au musée Crozatier, au bout du superbe jardin Henry Vinay. Une information m'a indiqué qu'en ce lieu était déposé par l'État, le fameux tableau de Lionel Royer-Noël "Vercingétorix jette ses armes au pieds de César", œuvre de style pompier du XIXe siècle et que l'on voyait jadis dans de nombreux manuels scolaires. À l'époque, on se permettait quelques approximations historiques quand on peignait un tableau, je ne garantis donc pas de la véracité de tous les détails. Néanmoins, devant cette œuvre, on sent passer le souffle de l'histoire, la grande, celle d'une partie de nos origines. Et n'oublions pas que les gaulois sont simplement le nom local de ce qui était les Celtes répartis dans toute l'Europe, y compris au-delà du Rhin.

Vous avez pris des forces. La digestion est lourde pour certains ? Il fait trop chaud ? Tant pis pour vous. Un certain nombre d'entre nous, sous la conduite éclairée de Gérard, vont monter, non pas au ciel, mais sur l'ancienne cheminée d'un volcan, vers la chapelle Saint-Michel d'Aiguilhe, édifiée en 962. Courage, il n'y a que deux cent soixante huit marches. Heureusement, deux fontaines d'une eau bienvenue vont nous rafraîchir en route, notamment celle qui est près de cette ravissante chapelle octogonale Saint-Clair, du XIIe siècle, au pied du rocher. Quatre vingt mètres plus haut, nous sommes récompensés merveilleusement de nos efforts. La magnifique façade du XIIe siècle, mélange heureux d'art roman et islamique, composée de losanges rouges, blancs et noirs, nous permet d'entrer dans la petite chapelle bien tempérée. Et là, bouche bée, nous découvrons les superbes fresques de la Genèse et de l'Apocalypse, datant du Xe et du XIIe siècle, restaurées récemment. Et la jeune guide est mignonne. Tout est donc parfait, surtout la vue que nous avons, de là-haut, sur le Puy et la campagne environnante. Pour un peu, on se prendrait pour des oiseaux prêts à s'envoler.

Avant le retour à Chadenac, personne n'a oublié d'acheter les spécialités locales ? La célèbre Dentelle du Puy est mentionnée pour la première fois en 1408. Il y avait tellement d'ouvrières, au XVIIe siècle, travaillant pour la dentelle, que les bourgeois du Puy ne trouvaient plus de domestiques. Le Parlement de Toulouse, en 1640, interdit donc le port de la dentelle sur les vêtements, pour diminuer la production et réduire ainsi la main d'œuvre nécessaire.

Puis vient la Lentille verte du Puy, d'appellation d'origine contrôlée. Sachez que le Plaza Athénée de New York le propose sur sa carte, avec du saumon. S'ajoute la Verveine du Velay, créée en 1859, à base de trente plantes, dont la gentiane jaune, que nous verrons demain, sur des prairies entières vers le mont Gerbier-de-Jonc. Et ce soir, beaucoup d'entre nous boirons la Vellavia, la bière du Velay , créée par neuf agriculteurs à partir de la "Ponote", l'orge de brasserie.

Le dîner festif, le soir à Chadenac, sera encore un moment fort à inscrire dans l'album de nos souvenirs. Je ne vais pas vous décrire le menu, car cela va me donner envie de me mettre à table, alors que je n'ai pas fini le récit de ce séjour au Puy-en-Velay. Mais puisque que l'on parle de gastronomie et de bonnes choses à se mettre sous la langue, je peux vous faire maintenant une confidence. À Chadenac, j'ai pris la chambre du fils de la directrice de l'établissement, qui me l'avait gentiment prêtée. Et dans la salle de bains, il y avait une grande réserve de bonnes bouteilles de vin, pas du picrate. J'ai eu la clef de la chambre contre la promesse de ne pas déboucher un de ces précieux trésors. Et je peux jurer que malgré une petite soif au milieu de la nuit, je n'ai pas cédé à la tentation.

Qu'est-ce qu'il faut faire comme sacrifice pour l'image de marque de l'ANEG !

Remise de fleurs à Éliane et Gérard pour la super organisation de cette A.G. 2009.
BRAVO et MERCI.

Quand à l'image forte que l'on aura de cette fin de journée, c'est celle de Brassens, le grand, l'unique, l'irremplaçable poète de Sète. Grâce à Gérard et Éliane, deux de leurs amis nous ont donné un émouvant récital des meilleures chansons de Brassens. Nous sommes particulièrement sensibles aux "Deux oncles", dont les paroles rappellent la stupidité criminelle de la guerre et le rapprochement des nouvelles générations françaises et allemandes :

"Que vos fill's et vos fils vont, la main dans la main,
Faire l'amour ensemble et l'Europ' de demain
Qu'ils se souci'nt de vos batailles presque autant
Que l'on se souciait des guerres de cent ans...".


Mais celle que l'on a écouté avec le plus de ferveur car elle concerne certaines de nos mamans, c'est "La tondue" :

"La belle qui couchait avec le roi de Prusse,
Avec le roi de Prusse,
À qui l'on a tondu le crâne rasibus,
Le crâne rasibus,...".

Chacun avait amené sa chaise pour ce beau spectacle sous la voûte des cieux, tous sont repartis avec un air en tête, à fredonner dans ses prochains rêves. Merci de tout cœur au musicien excellent et au chanteur magnifique de talent.


DIMANCHE 14 JUIN 2009

Comme les bonnes choses passent trop vite. C'est le dernier jour de notre rencontre nationale. Déjà, certains nous quittent, le cœur un peu serré, car ils savent bien, nous aussi, qu'il faudra attendre une année avant de se revoir, pour plusieurs d'entre eux. Les étreintes sont un peu plus fortes, les au revoirs plus intenses.

Quand au reste de la troupe, regroupement dans les deux cars qui vont nous emmener pour commencer vers le village de Moudeyres, typique avec ses toits de chaume. Nous visiterons l'ancienne ferme des frères Peyrel, transformée en musée d'art paysan.

L'ancienne ferme des frères Peyrel - (Photos Michel Nivoix).

*

Le dépaysement est garanti. Tout est resté comme lorsque les deux paysans vivaient dans les lieux. Les charpentes sont superbes. Le broc à lait attend presque la prochaine traite, tandis que le four à pain va chauffer. J'ai beaucoup de mal à m'imaginer les deux derniers occupants de ces lieux dans un HLM d'une grande banlieue ou près du périphérique parisien. Nous sommes là dans le choc de deux modes de vie qui s'opposent. Quel était le mieux ? le plus sage ? le plus vrai ? Il y a sans doute un compromis à trouver entre une vie archaïque, rude, sans artifice clinquant et la recherche d'un confort mais sans le stress de notre époque.

Nous cheminons ensuite par les hauts plateaux du Mézenc vers le village des Estables, station hivernale, où chacun pique-niquera ou trouvera un restaurant, dont un était déjà retenu. Écoutant attentivement les explications de Gérard, nous imaginons ces immenses étendues, occupées par quelques rares fermes isolées pratiquant exclusivement l'élevage des bœufs fin gras du Mézenc, sous la neige l'hiver, coupées du monde. Si vous aimez la solitude, vous avez enfin trouvé l'endroit idéal où vous retirer. Nous sommes surtout intrigués par les dizaines de monts en forme de cuvettes, appelés localement "sucs" que nous voyons jusqu'au lointain horizon. Ce sont les effondrements circulaires d'anciens volcans, qui étaient en activité il y a quelques millions d'années. Cela devait chauffer dur dans le coin.

Enfin, nous arrivons à notre dernière étape !

Gerbier-de-Jonc, non ce n'est pas un jeune hobereau local. Il a huit millions d'années. Au pied de ce mont (il est quand même à mille cinq cent cinquante et un mètres !), surgissent des entrailles de la terre les trois sources de la Loire. L'Authentique sera aménagée en 1938 par le Touring Club. La Véritable ou officielle comporte une inscription Ici commence ma longue course vers l'océan. La Loire aura mille douze kilomètres pour arriver dans l'estuaire après Nantes. La Géographique, où nous sommes, est devenue une usine à touristes, la Babylone originelle de la "Liga" ou "eau trouble" ou "limon" comme l'appelaient les celtes vellaves. Les romains lui donneront le nom de "Liger". Puisque nous sommes dans la linguistique, le Mont Gerbier-de-Jonc vient "Gar" rocher et de "Jugum" montagne.

La source sort dans un bassin à l'intérieur d'une vieille grange de quatre siècles, dans laquelle a été aménagé un magasin de souvenirs, babioles de toutes sortes, capharnaüm destiné à vider les bourses des pèlerins de passage. Le toit de lauzes, dalles minces et sonores, venant du grec "voix" et "pierre" pèse cent tonnes (c'est bien le chiffre). Les murs font un mètre de large. L'eau de la source est très bonne à boire, mais il y a une longue queue pour accéder au bassin. On se croirait à Lourdes ! Comme nous sommes maladroits à capter l'eau entre nos doigts, nous pouvons avoir un gobelet en plastique en échange du dépôt de quelques centimes dans une tire lire. Je dois encore avouer que de retour dans mes terres normandes, j'ai été vérifier les prix des paquets de gobelets en plastique. Je puis vous affirmer que ce commerce, au Mont Gerbier-de-Jonc, est très rentable. Certains, malgré le temps trop court attribué sur place, essayeront de gravir le mont mythique. Il y en a même qui louperont le départ du car à cause de cela, mais heureusement elles trouveront de charmants automobilistes pour les ramener au Puy-en-Velay. Tout autour des sources de la Loire, ce sont d'immenses champs bleus de "pensées des montagnes". S'il n'y avait l'herbe et les fleurs en profusion, que la roche nue, nous pourrions nous croire dans un paysage lunaire, loin de tout signe de civilisation (malgré le vrombissement des nombreux cars et voitures et la bonne dizaine de boutiquiers !).

Mais je suis heureux. Aller aux sources de la Loire était un projet caressé depuis longtemps, le paysage est magnifique, je viens de découvrir de nouveaux horizons, je suis un tout petit peu moins inculte.

Ce bonheur continuera le dimanche soir par une veillée autour d'un feu de bois. Ceux qui ont beaucoup travaillé à la réussite de ce séjour au Puy-en-Velay se relâchent un peu. Certains s'essayent à la chansonnette ou à quelques pas de danse sioux. D'autres ont une blague ou une devinette à partager. Certaines préféreraient, qu'assis sous la voûte des cieux, nous admirions en silence le ciel et que nous méditions sur nos destinées. C'est un moment fort de convivialité, de paix, de joie, un moment béni comme nous les aimons tous. Seuls les moustiques, attirés par les nombreux rires, sont repoussés par la fumée du foyer.


Monique dans sa célèbre "Danse du feu" des Sioux.
Malheureusement, il lui manque les vêtements et les plumes !



La grande prêtresse Jeanine en pleine incantation !
(Photo Pierre Mailait).


LUNDI 15 JUIN 2009

C'est maintenant la fin d'un séjour qui s'est passé comme un rêve. C'est l'heure de nous quitter. C'est l'heure aussi de dire cent fois, mille fois merci à tous ceux qui ont préparé et encadré cette rencontre nationale 2009. Merci aussi à la direction et au personnel du domaine de Chadenac qui nous ont couvés pendant ces quelques jours. La palme revient aussi à Éliane et Gérard Trincal, sans qui rien ne se serait fait efficacement dans cette ville de France que nous ne connaissions pas. Tous ont droit maintenant à de vraies vacances. Quand à moi, qui vous a trop longuement soûlé de mes bavardages épistolaires, j'ai l'impression que je suis là, en vacances, depuis très longtemps. Je vais repartir dans ma Normandie, mais j'ai la sensation d'être sur un nuage. Et une conviction me lancine au fond de moi-même : "Voilà un coin où je vais revenir bien volontiers !". Me vient alors à l'esprit un air de chanson fredonné dans mon enfance au patronage du village :

Ce n'est qu'un au revoir, mes frères, ce n'est qu'un au revoir...

Cet au revoir, je le dédie à vous tous qui étiez autour de moi,
adhérents ou non de l'ANEG, au Puy-en-Velay,
mes sœurs et mes frères de cœur,
ma deuxième et peut-être vraie famille
.


Dominique SAMSON
Rouen, le 27 août 2009.


Allocution de Marie-Cécile




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